Article de Mathias Rota

La culture en capitales - 1ere partie

Sur trois articles, Mathias Rota revient sur le concept des Capitales culturelles.

Voici près de 40 ans que des villes de l’Union européenne accèdent au titre éphémère de Capitale culturelle. Loin de s’essouffler, l’initiative soulève toujours de très nombreuses candidatures attirées par les effets positifs de la culture sur les territoires. Le succès de ce programme est si retentissant qu’il a d’ailleurs été imité à de très nombreuses reprises à travers la planète, laissant la Suisse parmi les rares pays dans lesquels les villes ne peuvent convoiter un tel titre.

Première partie d’un triptyque, cet article revient sur l’évolution des Capitales européennes de la culture, évoque les principales adaptations nées du concept original et témoigne des effets potentiels de ces programmes en s’appuyant sur une importante revue de littérature scientifique. Les deux articles suivants concerneront la pertinence de la création d’une action similaire en Suisse, selon l’idée lancée en 2013 par Daniel Rossellat, et le projet d’attribuer à La Chaux-de-Fonds le titre de première Capitale Culturelle Suisse.

 

Le pouvoir du titre de capitale européene de la culture

Carte : https://datawrapper.dwcdn.net/KwgrV/5/

Veszprém en Hongrie, Timisoara en Roumanie et Éleusis en Grèce se sont ajoutées en 2023 à la longue liste des villes lauréates du titre de Capitale européenne de la culture (voir la carte ci-dessus). Imaginée en 1983 par Melina Mercouri, actrice grecque devenue ministre la culture, et organisée pour la première fois en 1985, à Athènes bien sûr, cette initiative passa pourtant d’abord presque inaperçue. Les premières éditions se déroulèrent en effet dans des villes dont l’aura culturelle était déjà si prestigieuse qu’elles ne surent trop que faire du surplus de visibilité qui leur était offert. Les festivités organisées à Florence (1986), Amsterdam (1987), Berlin-Ouest (1988) et Paris (1989) furent peu remarquées et il fallut attendre que, contre toute attente, le Royaume-Uni sélectionne Glasgow comme Capitale européenne 1990 pour que le programme prenne enfin son envol.

Car si ce choix fut d’abord reçu très tièdement – la cité écossaise ne possédait à l’évidence pas l’illustre réputation artistique des villes précédemment lauréates et son territoire portait les stigmates d’un long déclin industriel –, Glasgow démontra pourtant que le titre de Capitale culturelle renfermait un pouvoir jusqu’alors insoupçonné. En misant sur une programmation prestigieuse, mais en organisant également des événements populaires, en rénovant des lieux dédiés à la scène locale, en ne confinant pas les festivités aux seuls mois d’été, mais en les répartissant sur une année entière, et en menant une campagne de marketing territoriale très offensive, cette édition rencontra un succès inespéré qui transforma jusqu’aux fondements de l’action européenne. Alors que le titre avait jusqu’alors principalement servi au renfort provisoire des budgets culturels et à l’organisation d’événements sans lendemains, il devint une accroche narrative utile à accompagner la renaissance de villes désindustrialisées en cités post-industrielles.

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Photo: © Visit Bradford